La nuit projetéeLes dimensions psychologique, sociale, culturelle de la nuit sont extrêmement riches. La nuit, moment de contemplation (de plus en plus rare) du ciel étoilé et moment des rêves, sollicite directement notre imaginaire. Éclairer la nuit c'est alors quelque part se couper de notre inconscient. Comprendre ce qu'est la nuit permet en effet de déchiffrer les mécanismes sous-jacents au phénomène de pollution lumineuse. Les humains de tous les continents, même si c’est à des degrés divers, émettent de la lumière artificielle la nuit et la pollution lumineuse est planétaire. D’une manière générale, on peut dire que ce phénomène relève ainsi de la déconnexion globale que les humains entreprennent progressivement vis-à-vis de la nature. Mais il reflète aussi de manière plus précise l’appréhension des concepts qui le sous-tendent, notamment la complémentarité jour/nuit et la cyclicité du temps. Fil d'Ariane : Accueil >> La nuit projetée >> L'imaginaire des Hommes déployé sur le ciel étoilé Permalien : http://www.nuitfrance.fr/?page=culture-psycho-societe&partie=ciel-etoile
► L'imaginaire des Hommes déployé sur le ciel étoilé« Deux choses remplissent le cœur d'une admiration et d'une vénération toujours nouvelles et toujours croissantes, à mesure que la réflexion s'y attache et s'y applique : le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale en moi. », Immanuel Kant (Critique de la raison pratique) Le symbole de l'étoile« Je me demande, dit-il, si les étoiles sont éclairées afin que chacun puisse un jour retrouver la sienne. », Antoine de Saint-Exupéry (Le Petit Prince, Chapitre XVII) De par la lumière qu'elle émet dans le ciel nocturne, l'étoile est par définition le symbole de l'influence spirituelle et du signe divin. C'est la clarté qui tranche avec le noir du ciel de la nuit, et donc par analogie le savoir qui triomphe de l'obscurantisme. Par là, l'étoile possède également la fonction de guide, à la fois réel (les étoiles permettent aux Hommes de se repérer spatialement, notamment par rapport aux pôles géographiques) et virtuel (la lumière qui guide dans les ténèbres). Dans les civilisations ancestrales, les étoiles étaient ainsi associées aux divinités voire étaient considérées comme des divinités elles-mêmes. Manifestation de l'âme des personnes défuntes pour les uns, servantes de la Lune pour les autres, les étoiles, présentes mais invisibles le jour, ont en tous cas toujours été les marqueurs du conflit entre forces spirituelles et forces matérielles. Dans nos sociétés modernes cette dialectique est toujours présente : l'étoile - et surtout via l'anglicisme "la star" - symbolise la personnalité vénérée, parce que extraordinaire, parfaite par contraste au reste des Hommes. L'étoile est aussi souvent utilisée sur les drapeaux, où elle représente la force et le rayonnement. Les constellationsLe ciel étoilé a toujours fasciné les civilisations et les hommes en ont fait un support de leur imagination en projetant sur des ensembles d’étoiles des formes quelconques qu’ils pensent y voir. Ce sont les constellations. On sait aujourd'hui qu'il s'agit effectivement d'un processus de projection, donc ascendant et non descendant, c'est-à-dire que les constellations n'ont pas été lues par les Hommes directement sur la voûte céleste pour en extraire ensuite un sens. C'est précisément l'inverse, les Hommes ont placé dans le ciel nocturne les personnages, animaux, objets de leurs mythes et légendes développés sur terre. Par exemple, la constellation du Lion prendrait ses origines dans la mythologie grecque. En effet, il s'agirait du Lion de Némée, qu'Héraclès dû affronter pour le premier de ses douze travaux et qu'il parvint à vaincre. En hommage à l'animal, roi des animaux, Zeus le plaça alors dans le ciel pour former cette constellation. La première compilation exhaustive connue de constellations est celle de Ptolémée, qu’il publia au 2ème siècle sous le nom d’Almageste : elle regroupe 1 022 étoiles en quarante-huit constellations. Aujourd’hui, l’Union astronomique internationale (UAI) divise le ciel en 88 constellations avec des frontières précises, pour que tout point du ciel appartienne à une constellation et à une seule. Certaines constellations sont très connues du grand public, telles que la Grande Ourse (en forme de casserole dans sa configuration restreinte, à l’origine cette constellation dessinant une véritable ourse) ou Cassiopée (en forme de « W »). ![]() Grande Ourse. Photo R. Sordello La Lune« Sa mort n'est jamais définitive. Cet éternel retour à ses formes initiales, cette périodicité sans fin font que la Lune est par excellence l'astre des rythmes de la vie », Mircea Eliade (Traité d'histoire des religions, 1949) La Lune est par définition l'astre de la nuit. Sa symbolique est multiple : - La symbolique de la Lune est tout d'abord à déterminer par rapport à celle du Soleil dont elle est le complémentaire. Dans la pensée chinoise, la Lune relève en effet du principe Yin et le soleil du principe Yang. Elle est ainsi à associer au féminin, au froid, à l'hiver, au nord, à la passivité et la réceptivité. - Du fait qu'elle ne fournit pas sa propre lumière mais qu'elle reflète celle du soleil, la Lune est alors aussi le symbole de la connaissance indirecte. Elle est par conséquent le savoir progressif mais aussi métaphorique, analogique ou encore conceptuel et bien sûr inconscient. - Enfin, par les différentes phases qu'elle présente successivement (Pleine Lune, Nouvelle Lune, ...), la Lune matérialise aussi fortement la notion de rythmes biologiques et de temps cyclique. Elle est en effet la mesure du temps vivant et symbolise la croissance (croissant de Lune), le renouvellement, la transformation et donc la fécondité. |
|||
|